Et maintenant voici les quelques postes que j'ai déjà obtenus, et qui m'ont rapporté de l'argent. Autrement dit ce sont mes expériences professionnelles.
Opératrice de tri
J'ai, en premier lieu, lors de mon année de césure, été embauchée à Valorys à Pluzunet, en tant qu'opératrice de tri pour trois semaines. Le but était de trier les déchets défilant sur un tapis, afin de les envoyer au recyclage par la suite.
Bien sûr, ça puait et on a eu quelques déchets peu ragoûtants comme un poulet déplumé périmé ou des rats desséchés, mais aussi un chat mort étrangement bien conservé. Malgré l'odeur et le bruit constant, l'ambiance était propice aux bavardages et amusements quelconques, d'autant plus qu'ils avaient recruté des jeunes comme moi, pour aider avec la montagne de déchets produits par les vacances scolaires. Car oui, je ne l'ai pas encore précisé mais j'ai travaillé là-bas les trois premières semaines d'octobre 2023. Et donc je disais que la bonne humeur s'est installée, en dépit aussi de certaines mésententes parmi les collègues déjà présents, et une bouilloire prête à exploser à la moindre remarque (pas une vraie bouilloire bien sûr, c'est une métaphore pour parler d'un gars très colérique).
Là-bas, j'ai appris à travailler en équipe, rapidement et en rythme, mais aussi à séparer le professionnel de la vie quotidienne notamment avec mon comportement, puisqu' avec certains collègues, les jeunes nouveaux, nous sommes allés au bar et je me suis bien rendue compte de quelle attitude adopter au travail VS avec les amis.
J'ai aussi mieux géré mon emploi du temps et mes occupations, cet emploi étant en 2/8 (CAD une équipe le matin et une le soir), nous alternions entre 5h 13h et 13h 21h (à peu près, je ne me souviens plus des horaires exactes) il fallait s'organiser pour ne pas perdre son rythme et vivre quand même avec sa famille, sans être hyper fatiguée en permanence. De plus nous avons dû faire face à quelques imprévus, comme une machine qui tombe en panne. A ce moment on a fait le ménage du coup, et c'était bien aussi, parce que le ménage avait besoin d'être fait avec toute la poussière amoncelée.
Bref ces semaines m'ont été bénéfiques à bien des égards, mais ce sont terminées un peu trop vite à mon goût... (même si je ne ferais pas ce métier toute ma vie, j'ai adoré trier les déchets et avoir les mains parfois littéralement dans le caca, vous verriez le nombre de couches que j'ai dû retirer en vitesse du tapis...).

Hôtesse de caisse
Et là, c'est l'heure de vous parler de mon plus long emploi : caissière polyvalente dans une grande surface appelée Netto.
Arrivée à ce stade où le monde du travail me déçoit et où je me désillusionne (malgré tous mes CV et lettres de motivation je n'ai pas d'emploi et surtout pas de réponses, ça ça m'a bien fait déchanter aussi, comment ça pas de réponses?) je passe par hasard dans un petit magasin en face du grand Intermarché où je vais d'habitude, et je tombe sur une feuille blanche scotchée à la caisse : Recherche emploi étudiant. Là, je reprends espoir, l'appétit me revient (c'est faux je l'ai jamais perdu à part une fois, en ayant la gatsro), et mon sang ne fait qu'un tour : cet étudiant, ça sera moi!
Me voilà donc à écrire une énième lettre de motivation et à la déposer avec le CV à la caisse, vu que le responsable n'était pas là. Et puis je m'en vais, sans grandes attentes, continuer ma vie. Il faut savoir qu'à ce moment là, je prends des cours de code de la route tous les jeudis avec la mission locale et l'auto-école ECF à Lannion. Comme je dépose mon cv un mercredi après-midi, je pars sur Lannion le soir dormir chez ma grand-maman pour pouvoir me rendre au code. Donc je passe une nuit en détente, paisiblement dans le lit super confortable chez mamie. Et là, c'est le drame : je me rends compte que j'ai oublié de dire que j'étais étudiante dans ma lettre!!! Crotte de biquette! Je m'empresse alors de regarder sur la toile du web comment contacter l'entreprise, et je vois une boîte de discussion : j'envoie alors un mail m'excusant et expliquant l'oubli.
Chose faite, je passe à autre chose et vais à mon petit cours. En sortant de là il est 12H45, et en regardant mon téléphone je vois un appel raté, mais je n'y prête pas attention : pas de message vocal, ils rappelleront si c'est important (très mauvaise façon de penser, il vaut mieux rappeler dans ces cas là parce qu'en fait, ils ne rappellent pas toujours). Donc voilà, j'évolue dans mon environnement naturel avec aisance et je déjeune, puis je retrouve ma mère venue me chercher et nous sommes sur la route du retour quand le numéro inconnu me rappelle. Je décroche et en fait, le responsable de Netto veut me voir! Il propose un entretien le plus vite possible! J'avoue que je panique un peu, mais on se cale l'entretien (car je ne le comprends pas encore mais c'est alors mon premier entretien d'embauche) le temps de faire la route (20min, ce qui est très peu pour mon petit cœur fragile, il a besoin de se préparer au stress). Bref l'entretien se passe super bien et j'ai une formation à faire avant de vraiment commencer (formation sur 2 week-end par une collègue experte), mais je commence deux semaines plus tard.
Et là, un nouveau monde s'ouvre à moi, et j'adore ça.
Pendant cette expérience, j'apprends beaucoup, et pas seulement à ranger, faire du facing ou être en caisse, j'apprends beaucoup humainement parlant. Le magasin se trouvant, je l'ai déjà dit, en face d'un magasin plus grand, et à côté d'un hôpital psychiatrique, les habitués se font nombreux et les clients sont parfois spéciaux. De plus il y a un système de compte client mis en place, et beaucoup de gens sous tutelle viennent faire leurs courses ici. L'enseigne est petite mais bien organisée et on y trouve tout ce qu'il faut.
Ainsi suis-je amenée à rencontrer des gens de toutes sortes, des riches et des beaucoup moins riches, surtout des petites gens qui galèrent. Les tentatives de vols ne se font pas rares, et il est fréquent de devoir retirer un article du panier puis de devoir, entre deux passage en caisse, remettre rapidement l'article à sa place.
Quand je ne suis pas à la caisse, je fais du facing (remettre les articles sur le devant), ou j'aide à la mise en rayon. Et dès que je vois un client aller vers la caisse, j'accoure.
C'est un travail de rapidité, d'efficacité, de discipline aussi, mais avant tout, de contact humain. Entre les collègues et les clients, on en croise du monde! En plus, dans un petit magasin où les gens se connaissent, la nouveauté attire et ravive la curiosité. Je sais que j'ai eu de la chance, parce que les clients et les collègues se sont montrés super gentils et compréhensifs, et que je n'ai pas eu de gros drames à gérer. Bien sur j'ai quelques anecdotes croustillantes mais ce n'est pas le lieu pour en discuter, et ce ne sont pas non plus des histoires dignes d'Hollywood. Quoique...
En tout cas, il me fallait donc être aimable et patiente, (jusqu'ici pas de soucis) mais surtout ouverte aux autres. Beaucoup de clients s'étonnant de voir une petite nouvelle, j'ai été questionnée sur mon parcours, les raisons de ma présence etc... et cela m'a permis de m'ouvrir et d'avoir davantage confiance en moi. Je pense que les clients m'ont appréciée, au moins autant que moi, car ce sont de très bonnes heures que j'ai passées derrière la caisse, à exécuter mon travail mais aussi à discuter et à écouter ceux qui en avaient besoin. De plus les venues récurrentes de certaines personnes m'ont même permis de tisser des liens, que je ne nommerais pas amitiés car c'était uniquement professionnel.
Mais il y a toujours du bon et du moins bon, alors oui, il y a eu des clients peu soucieux du bien-être des autres qui ne respectaient pas autrui, et qui s'énervaient ou venaient pour se plaindre, mais ils étaient minoritaires. Même si certains m'ont bien fait peur, je dois l'avouer, cela m'a permis aussi de dépasser ce sentiment et de m'affirmer, de grandir émotionnellement. Pour illustrer ça je vais raconter un truc qui m'a terrorisée plusieurs semaines, jusqu'à ce que je trouve le courage de mettre fin à ce manège. Je travaillais, de base, exclusivement les dimanches matin, mais il n'était pas rare que l'on me fasse travailler en semaine les jours pleins (souvent les vacances scolaires), et donc me voilà en caisse un jeudi. Je fais du facing, et un client passe à ma droite. Je lui dis un bonjour souriant et enjoué, normal, et il me répond en chuchotant avec un drôle de regard. Je comprends alors que j'ai affaire avec un type un peu atypique, mais je n'y prête pas d'importance car, encore une fois, on croise tous genres de personnes ici. Alternant entre caisse, et facing, je le recroise souvent durant la demi-heure qui suit, normal dans un petit magasin. Il passe en caisse puis s'en va, je finis ma journée tranquillement.
Plus tard dans le mois, sans l'avoir revu, je le croise en faisant mes courses avec ma mère au supermarché d'en face et il me suit dans les rayons. Au bout d'un moment je ne le vois plus et je suis rassurée mais devinez qui attend dehors avec sa baguette, assis sur un petit poteau?? Et ben ouais, c'est lui! Je fais mine de pas voir sa présence et fonce vers la voiture, et je demande à ma daronne : "tu vois le monsieur là-bas, qu'est ce qu'il fait? Si il vient lui parle pas steuplé". Elle me répond alors " ouais nan te retourne pas il vient vers nous et il regarde par ici en souriant". Je me souviendrais toujours du regard de ma mère, parce que c'était la première fois que je voyais cette peur teintée d'incompréhension dans ses yeux. C'était à la fois touchant et effrayant (ici, imaginez un gros plan à l'américaine sur le faciès de ma petite maman), et pour une fois, c'est elle qui va ranger le caddie pendant que je m'assois dans le bolide. On va ensuite à la pompe à essence à la sortie du parking (ou à l'entrée, c'est pareil), et là encore il rôde autour de la voiture, avec une expression de joie intense et d'excitation. Je suis tétanisée dans le véhicule, le regardant comme un petit lapin pris dans les phares d'une voiture : terrifiée mais incapable de bouger.
Un dimanche se passe sans que je le vois, mais le revoilà le dimanche suivant, et celui d'après aussi, et encore plus tard... Bref, il devient un habitué du week-end, et me reluque à chacune de ses venues, en chuchotant des mots incompréhensibles en me regardant. Quand il paye en monnaie, il fait un mouvement pour bien toucher mes mains avec ses sales pattes, et ça me dégoute. A chaque fois je redoute cette instant. Le pire, c'est que j'ai travaillé en semaine après, et je ne l'ai pas croisé une seule fois (bon après il aurait pu passer quand je n'étais pas là ou quoi), mais comme par hasard le dimanche bam, qui voilà? Je le soupçonne donc d'avoir modifié ses habitudes ...
Ce qui m'a fait rire en revanche, c'est qu'il est passé quelques fois après avec sa femme et ses enfants, et là comme par hasard, on découvre un gars normal, timide mais normal.
Ce petit manège donc, a pris fin quand j'ai pris mon courage à deux mains et que je suis allée le confronter sur le parking, une baston sanglante s'en ai suivi et j'ai été virée. C'est faux bien sûr, je n'aurais jamais fait ça bahahaha. Je reprends : il a arrêté quand j'ai pris mon courage à deux mains et que je lui ai montré que je n'avais pas peur de lui, qu'il n'était qu'un client comme les autres et que je ne m'attardais pas sur son cas. Bien sûr, je n'avais aucune idée de la finalité de mes actes, mais ma stratégie a porté ses fruits puisqu' ensuite, il avait l'air honteux, presque repentant, quand il passait en caisse avec moi par la suite.
Donc, tout ça pour vous dire qu'à Netto, j'ai appris bien plus que juste à mettre en rayon et passer en caisse, là-bas j'ai vu les conditions humaines, ou parfois inhumaines, dans lesquelles les gens vivaient vraiment, j'ai appris à me poser les bonnes questions sur la vie qu'on mène, j'ai côtoyé tous styles de vie et de personnes, et ai appris à les connaître. Je ne me prétends pas grande spécialiste, mais si certains voyaient comme j'avais vu les vies des autres, ils comprendraient vraiment les enjeux importants de la société.
Enfin ça forge de bosser là-bas quoi.
Bon, c'est pas tout ça, mais maintenant, passons à la suite!